Lorsque l’on arrive au Grand Palais, nous sommes face à un grand mur de boîtes rouillées. Derrière celui-ci, l’intérieur du Grand Palais: immense, froid avec comme fond sonore des battements de cœur. Sur le sol sont disposés des carrés de vêtements délimités par des poteaux métalliques. Au fond de la salle culmine un monticule d’habits surplombé par une grue à 25 mètres du sol, qui vient les piocher, les soulever et les laissent ensuite retomber.
Christian Boltanski évoque dans cette installation monumentale mémoire et histoire collective. Ce grand amas de vêtements piochés par une grue n’est pas sans rappeler les tas d’habits juifs que les Nazis empilaient séparément des corps durant la Shoa. Les 42 carrés de vêtements au sol nous évoquent des tombes, tel un immense cimetière. De plus si nous nous plongeons dans le passé de Christian Boltanski nous découvrons que de nombreux membres de sa famille on été déportés durant la seconde guerre mondiale. Cette partie de son histoire est un moteur pour son travail , il aborde régulièrement les thématiques de l’histoire, la mémoire et la mort. L’installation Personnes n’en fait pas exception et dès lors que nous déambulons à l’intérieur nous ressentons une atmosphère austère.
Le thème de la mort est d’ailleurs clairement affirmé , Christian Boltanski précisera en parlant de la grue:
« Pour moi, c’est le doigt de Dieu qui prend la vie, qui tape au Hasard… ».
Réalisée en hiver, sans chauffage, le visiteur est immergé dans une atmosphère hostile, glacée, les sensations et émotions qu'il éprouve ne sont pas agréables. C’est justement l’objectif de Christian Boltanski, faire éprouver des émotions, qu’elles soient positives ou négatives, en sollicitant tous les sens du spectateur. Ainsi la température, le son du battement des cœurs, l'odeur des vêtements, sont les constituants de l'œuvre, comme le seraient formes, couleurs, lignes. Ces éléments sont porteurs de sensations, d'émotions et de signification.
Le titre « PERSONNES » prend un double sens pour cette installation, « PERSONNES» signifie d’une part, l’absence, le vide, qui correspond aux vêtements sans corps. Mais on peut aussi y voir la présence des milliers de personnes à qui appartiennent les vêtements, et dont on peut entendre les battements de cœur résonner sous les nefs. Entre mémoire collective et intime.